Face au risque croissant de sécheresse, le Maroc teste des systèmes flotovoltaïques à Oued Rmel, inaugurant une centrale solaire flottante de 13 MW. L’initiative allie production électrique verte et préservation des ressources en eau, illustrant une approche innovante et durable pour répondre aux enjeux énergétiques et hydriques du Royaume.
Electricité verte et réduction de l’évaporation : une double performance
Situé à proximité du port stratégique de Tanger Med, le barrage d’Oued Rmel s’est vu équiper de panneaux photovoltaïques flottants couvrant une surface de dix hectares sur les 123 hectares du plan d’eau. Mis en service en fin août 2025, ce projet pilote vise à générer 13 MW d’électricité destinée au complexe portuaire tout en limitant l’évaporation, qui atteint jusqu’à 7 000 m³ par jour en été, soit une réduction estimée de 30 %.
Systèmes flotovoltaïques : une réponse technologique aux tensions hydriques
Le choix des panneaux flottants va bien au-delà de la production d’énergie. Cette technologie permet de rentabiliser une surface habituellement sous-exploitée, d’épargner les terres agricoles, d’augmenter le rendement grâce au refroidissement naturel des modules et de réaliser d’importantes économies d’eau. Le Maroc rejoint donc une tendance mondiale émergente face aux changements climatiques.
Un jalon pour la transition énergétique marocaine
Le parc flottant d’Oued Rmel s’inscrit pleinement dans la stratégie nationale visant à porter la part des énergies renouvelables à plus de 52 % du mix électrique d’ici 2030, amorcée avec des projets emblématiques comme Noor Ouarzazate (580 MW). Il propose une réponse complémentaire, permettant au Maroc d’intensifier sa transition énergétique sans détourner de précieuses ressources.
Tanger Med : hub durable et innovant
Alimenter le port de Tanger Med, l’un des plus importants d’Afrique, en électricité propre renforce sa compétitivité tout en contribuant à une logistique plus verte. Cette initiative s’inscrit dans une vision ambitieuse : 100 % d’énergie renouvelable à l’horizon 2030 pour les infrastructures portuaires.
Perspective mondiale : un potentiel colossal pour l’Afrique
Selon l’Association allemande de l’industrie solaire (Solarize Africa Market Report 2023), exploiter ne serait-ce que 1 % des réservoirs artificiels disponibles en Afrique, soit 100 000 km², représenterait une capacité flottovoltaïque de 100 GW. Des pays comme le Zimbabwe, le Soudan ou l’Éthiopie possèdent déjà un potentiel supérieur à leurs besoins nationaux.

Des avantages techniques et économiques notables
Les systèmes flotovoltaïques présentent plusieurs atouts :
- Réduction des coûts d’acquisition de terrain, car nul besoin de mobiliser des surfaces au sol.
- Rendement supérieur des panneaux grâce au refroidissement par la surface aquatique.
- Diminution des pertes d’eau, ressource de plus en plus précieuse en contexte de sécheresse.
- Utilisation optimisée d’espaces sous-utilisés, souvent en dehors des zones écologiquement sensibles.
Limites et défis à anticiper
Cette technologie ne se déploie pas sans obstacles :
- Il est impossible de couvrir l’intégralité du plan d’eau en raison du relief ondulé et des variations du niveau d’eau, susceptibles d’endommager les structures.
- Des risques environnementaux potentiels (perturbation des écosystèmes aquatiques, impact sur le phytoplancton) doivent être évalués.
- L’accroissement des réserves hydriques dépend également de la capacité du pays à redistribuer l’eau du nord vers les régions centrales et méridionales, notamment via des infrastructures telles que l’“autoroute de l’eau”.
Cap sur la réplicabilité du modèle
Déjà, des projets similaires sont à l’étude :
- Lalla Takerkoust, près de Marrakech.
- Oued El Makhazine, un des plus grands barrages du pays, avec une perspective d’installation de 22 000 panneaux.
Ces initiatives permettraient d’alimenter des stations de pompage, tout en évitant chaque année des milliers de tonnes de CO₂.
Innover pour durer
Le projet de systèmes flotovoltaïques d’Oued Rmel constitue une réponse concrète à la double urgence climatique et hydrique. En alliant production d’énergie propre et préservation de l’eau, le Maroc démontre qu’innovation et durabilité peuvent cohabiter harmonieusement. Ce modèle, à la fois reproductible et scalable, pourrait inspirer d’autres pays africains confrontés aux défis climatiques et à la raréfaction des ressources.
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