Le continent africain vit un véritable essor photovoltaique. Selon un rapport publié en août 2025 par le think tank Ember, les importations de panneaux solaires en provenance de Chine ont atteint un volume record de 15 032 MW entre juillet 2024 et juin 2025, contre 9 379 MW sur la période précédente. Cette augmentation de 60 % en un an reflète l’accélération de la transition énergétique africaine et ouvre des perspectives inédites pour la diversification des mix électriques nationaux.
Un saut quantitatif qui change l’équation énergétique
Jamais auparavant le continent n’avait connu une telle vague d’importations de modules solaires. Si ces panneaux étaient intégralement installés, leur contribution permettrait d’augmenter d’au moins 5 % la production d’électricité de 16 pays africains, avec des impacts spectaculaires dans certains États fragiles. La Sierra Leone verrait sa production croître de 61 %, tandis que le Tchad enregistrerait un bond de 49 %.
Ces chiffres témoignent de l’importance de la dynamique en cours : les importations ne sont plus uniquement concentrées en Afrique du Sud, comme lors des pics enregistrés en 2023, mais réparties sur l’ensemble du continent. Pas moins de 20 pays ont atteint un record d’importations et 25 ont dépassé le seuil symbolique des 100 MW importés, contre seulement 15 pays un an plus tôt.
Essor photovoltaïque : l’Afrique se diversifie au-delà de l’Afrique du Sud
L’Afrique du Sud reste le premier importateur, avec 3 784 MW, mais elle n’est plus seule à tirer la croissance. Le Nigeria est désormais le deuxième importateur avec 1 721 MW, surpassant l’Égypte (854 MW). L’Algérie a fait une percée spectaculaire en occupant le troisième rang avec 1 199 MW, suivie du Maroc (915 MW), de la Tunisie (655 MW), du Sénégal (519 MW) et de la Zambie (424 MW).
Les taux de croissance sont impressionnants :
- L’Algérie a multiplié ses importations par 33 en un an.
- La Zambie les a multipliées par huit.
- Le Botswana par sept.
- Le Soudan par six.
- Le Liberia, la RDC, le Bénin, l’Angola et l’Éthiopie ont triplé leurs volumes.
Ces données confirment que l’essor photovoltaïque s’étend désormais à toute l’Afrique, et non plus seulement aux grands marchés établis.
Une rentabilité accrue face aux carburants fossiles
Le rapport d’Ember souligne également l’intérêt économique du photovoltaïque pour les pays africains fortement dépendants des importations de carburants fossiles. Un panneau solaire de 420 watts, vendu environ 60 dollars au Nigeria, produit 550 kWh d’électricité par an. En comparaison, 60 dollars de diesel ne permettent de produire que 275 kWh.
Cela signifie qu’un panneau solaire peut s’amortir en seulement six mois, et même plus rapidement dans les pays où le diesel est plus coûteux. À long terme, le photovoltaïque représente une alternative économique solide, permettant de réduire les factures énergétiques et la dépendance vis-à-vis des importations de pétrole raffiné, dont la valeur est encore 30 à 107 fois supérieure à celle des panneaux solaires.
Des impacts nationaux majeurs
Les gains potentiels sur la production électrique sont notables :
- En Liberia, les panneaux importés équivaudraient à 25 % de la production de 2023.
- En Somalie et en Érythrée, à 15 %.
- Au Togo, à 11 %.
- Au Bénin, à 10 %.
Ces proportions montrent que même des pays à petite échelle énergétique peuvent connaître des transformations radicales grâce au solaire. Le photovoltaïque devient un outil clé pour combler les déficits énergétiques chroniques et soutenir la croissance économique.

Un continent encore dépendant des importations
Si l’Afrique enregistre une envolée de ses importations de panneaux, la production locale reste limitée. Seuls quelques pays disposent de capacités industrielles significatives :
- Le Maroc a récemment doublé sa capacité de production, atteignant 1 GW par an.
- L’Afrique du Sud possède une capacité similaire.
- L’Égypte et le Nigeria disposent de chaînes de production modestes.
Cette dépendance structurelle pose question à long terme, car elle rend les marchés africains vulnérables aux fluctuations des prix et aux tensions commerciales internationales.
Des projets solaires géants en préparation
Parallèlement aux importations, plusieurs mégaprojets vont renforcer la dynamique solaire en Afrique. En Égypte, trois initiatives d’envergure sont prévues :
- EliTe Solar : 3 GW, à partir de septembre 2025,
- Sunrev Solar : 2 GW, en 2026,
- Masdar : 4 GW, en attente de lancement.
Ces projets viendront compléter les importations actuelles et marquer une étape décisive pour le développement industriel du solaire sur le continent.
Vers une nouvelle carte énergétique africaine
L’explosion des importations chinoises de panneaux solaires reconfigure la carte énergétique du continent. Elle démontre que l’Afrique est prête à accélérer sa transition, mais souligne aussi la nécessité de :
- Développer des capacités industrielles locales,
- Mettre en place des politiques incitatives pour attirer les investisseurs,
- Créer des chaînes de valeur régionales pour réduire la dépendance.
Le solaire devient ainsi une arme stratégique, à la fois pour la sécurité énergétique, la compétitivité économique et la lutte contre le changement climatique.

Un signal fort pour les bailleurs et investisseurs
Pour les bailleurs de fonds et les investisseurs privés, la croissance de 60 % des importations en un an est un indicateur de marché puissant. Elle traduit une demande croissante, une volonté politique affirmée et une prise de conscience des avantages économiques du photovoltaïque.
L’Afrique n’est plus seulement un marché potentiel : elle est désormais un marché actif, en pleine expansion, qui attire l’attention des développeurs mondiaux et des institutions financières.
L’essor photovoltaïque, moteur de la transformation africaine
Le rapport d’Ember constitue la première preuve chiffrée d’un véritable décollage du solaire en Afrique. Avec plus de 15 GW de panneaux importés en douze mois, le continent démontre son appétit croissant pour les énergies propres et son engagement à bâtir un futur énergétique durable.
Cet essor photovoltaïque ouvre des perspectives inédites : accroître la production locale d’électricité, réduire les importations de carburants fossiles, créer des emplois et renforcer la résilience des économies africaines.
Mais pour transformer cette dynamique en révolution durable, l’Afrique devra investir dans sa propre industrie, renforcer ses infrastructures et favoriser la coopération régionale. C’est à ce prix qu’elle pourra passer du statut d’importateur dépendant à celui de producteur intégré et compétitif.
En un mot, le solaire n’est plus une option : il est en train de devenir le cœur battant du futur énergétique africain.
Leave a Reply