L’Union européenne a dévoilé un plan ambitieux de 545 millions d’euros dans le cadre de son initiative Global Gateway, destiné à soutenir le développement d’une infrastructure énergétique durable à travers l’Afrique. Ce financement vise à accélérer la transition vers les énergies propres, améliorer l’accès à l’électricité, moderniser les réseaux de transmission et électrifier les zones rurales.
Un soutien ciblé pour des projets clés en Afrique
Le plan alloue une part substantielle des fonds à des projets concrets d’infrastructure énergétique dans plusieurs pays africains. En Côte d’Ivoire, 359,4 millions d’euros sont consacrés à la ligne haute tension « Dorsale Est », afin de renforcer la distribution régionale d’énergie. Le Congo recevra 3,5 millions d’euros pour étendre l’accès aux énergies renouvelables (solaire, éolien, hydro). Au Lesotho, 25,9 millions d’euros appuieront le programme Renewable Lesotho axé sur l’exploitation des ressources éoliennes et hydroélectriques. En Afrique centrale, 3,3 millions d’euros financeront l’intégration énergétique régionale, notamment une étude de faisabilité pour une ligne de transmission transfrontalière baptisée Friendship Loop.
D’autres volets du plan incluent l’électrification rurale au Cameroun, des études pour un parc solaire au Ghana, le déploiement de mini-réseaux à Madagascar, le soutien aux projets de transition énergétique soutenus par le secteur privé au Mozambique, et l’extension de l’accès à l’électricité en Somalie.
L’UE présente ce soutien comme un élément central de sa campagne « Scaling Up Renewables in Africa », en partenariat avec l’initiative Mission 300, destinée à mobiliser les investissements publics et privés vers les renouvelables en Afrique. Cette campagne culminera lors du sommet du G20 en Afrique du Sud en novembre.
Par ailleurs, le programme Global Gateway, lancé en 2021 avec un budget total de 300 milliards d’euros, concentre une grande part de ses efforts sur l’Afrique à travers des projets d’énergie, numérique et infrastructure énergétique.
L’urgence énergétique africaine au cœur du plan
Environ 600 millions d’Africains sont encore privés d’accès à l’électricité, ce qui rend l’investissement dans les infrastructures énergétiques et les renouvelables une priorité à la fois pour le développement et le climat. L’UE rappelle que l’Afrique possède des ressources solaires parmi les plus abondantes au monde, bien qu’elle ne reçoive qu’environ 3 % des investissements énergétiques globaux. Au sein du plan Global Gateway, l’UE et ses États membres travaillent avec des institutions financières pour aligner les projets sur les stratégies nationales, en favorisant les marchés intégrés, la création d’emplois durables et la transition verte.
Lors de la troisième réunion ministérielle UE-Afrique, les gouvernements africains ont appelé à des mécanismes de financement innovants (garanties, fonds mixtes, obligations vertes) et à un renforcement des cadres institutionnels pour soutenir l’électrification rurale, les solutions décentralisées et le transfert technologique dans le secteur des énergies renouvelables.
Opportunités & défis : l’équation complexe de l’infrastructure énergétique
Opportunités
- Levée de capitaux stratégiques : cette enveloppe attire l’attention sur le potentiel crédible du secteur énergétique en Afrique.
- Effet catalyseur : le financement public peut déclencher des investissements privés en rendant les projets plus bancables.
- Renforcement des réseaux : les investissements dans les lignes de transmission et en interconnexions facilitent le partage régional d’électricité.
- Transformation structurelle : à long terme, l’Afrique pourrait développer ses propres capacités industrielles dans les technologies renouvelables, réduisant la dépendance aux importations.
Défis
- Capacité administrative & réglementaire : la réussite de ces projets exige des processus transparents, des garanties contractuelles solides et des institutions solides.
- Maintenance & durabilité : investir dans des infrastructures résilientes, avec des plans de maintenance à long terme.
- Risque de dépendance extérieure : certains analystes craignent que les investissements européens ne deviennent des leviers d’influence ou renforcent la dépendance continentale.
- Impact social et environnemental : il sera essentiel de garantir que les projets bénéficient aux populations locales, en respectant les critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance).
Certains observateurs ont critiqué la stratégie Global Gateway, estimant que certains projets pourraient favoriser l’exportation d’énergie ou de ressources vers l’Europe, plutôt que de répondre aux besoins de l’infrastructure énergétique domestique des communautés africaines.

Vers une coopération renforcée entre l’Afrique et l’UE
Pour que cet ambitieux paquet financier catalyse une transformation réelle, plusieurs conditions sont à réunir:
- Renforcer les partenariats horizontaux : favoriser la gouvernance locale, la participation publique, et la transparence.
- Adapter les technologies aux contextes locaux : privilégier les solutions décentralisées (mini-réseaux, systèmes hybrides) là où le raccordement au réseau central est coûteux ou difficile.
- Promouvoir le transfert de compétences : au-delà du financement, les projets doivent intégrer la formation, la fabrication locale de composants et l’appropriation technologique.
- Assurer la viabilité des recettes : les États africains doivent garantir des conditions d’achat de l’électricité (tarifs, contrats à long terme) pour sécuriser les revenus des projets.
En outre, l’alignement avec les initiatives africaines comme Mission 300 ou la création d’un marché continental de l’électricité (AfSEM) renforcerait la cohérence des investissements et leur impact à grande échelle.
Avec cette allocation de 545 millions d’euros, l’UE déploie un instrument puissant pour accélérer la transition vers les énergies renouvelables sur le continent africain. L’accent mis sur l’infrastructure énergétique, l’électrification rurale et les partenariats publics-privés donne à ce plan un caractère stratégique.
Pour que la vision se réalise, le succès dépendra non seulement de la mobilisation des fonds, mais aussi de la solidité des cadres institutionnels, de l’engagement local, de la durabilité des infrastructures et de l’impact concret sur les populations. Si l’Afrique et l’Europe réussissent à coopérer sur ces bases, ce paquet pourrait être un catalyseur de transformation sur le chemin d’un avenir énergétique plus juste, inclusif et durable pour le continent.
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